Chroniques : le 23 avril 2018

Publié le par Kansaijin

Chroniques : le 23 avril 2018

Bonjour chers gens qui vous intéressez à mon humble quotidien

SAKURAS

Voilà, cette année les sakuras ont fleuri fin mars, une première depuis que je suis au Japon! Du jamais vu, car ils attendent normalement le début d'avril pour se manifester! Par conséquent, beaucoup de festivals pour les célébrer en musique, en évènements et en gargotes, prévus depuis longtemps pour le 6 avril, ont eu lieu... sans fleurs. Les sakuras en fleur... cette année encore, ils m'ont surprise par leur beauté saisissante, par nuées immenses, avec leurs branches comme remplies d'épaisses dentelles de lumière douce.

CEREMONIE D'ENTREE A L'UNIVERSITE

Ma fille est entrée à l'université. Nous l'avons accompagnée à la cérémonie officielle, avec les autres parents, tous habillés de costumes sombres formels, les mamans aux tailleurs d'un autre âge sur collants beige épais, avec le collier de perles blanches et la grosse fleur de tissu sur le col. Non, je ne me voyais vraiment pas porter ça ; je me serais sentie déguisée! De ce fait, j'étais la seule mère en pantalon, que l'on a d'ailleurs trouvé chic, et je pouvais me le permettre car j'étais une étrangère, une Gaijine! Nos jeunes aussi, tous en noir ou en bleu marine avec chemisier blanc, comme pour aller travailler! Non, officiellement il n'y a pas d'obligation vestimentaire définie, les gens fonctionnent selon des règles sociales implicites et s'y conforment ainsi naturellement. Une dame de ma connaissance, très ouverte et admirative de l'Occident "où les gens savent s'affirmer", avait envie d'apprendre à sa fille à se mette en avant faisant fi du regard des gens, et lui avait acheté un beau tailleur blanc. Celle-ci l'a donc courageusement porté malgré elle, pour revenir de la cérémonie en pleurs car s'était sentie en dehors du lot, le "clou qui dépasse", qui cherche prétentieusement à se faire remarquer, la honte de sa vie, la pauvre! Et sa mère de regretter...

D'abord accueillis dehors par des danseurs en synchro agitant le drapeau illustré du logo de la fameuse université, puis entrés dans l'immense salle à gradins, les jeunes au devant de la scène, ça a été re-li-gieux. Puis, sur la large estrade surélevée, entre les grands et artistiques arrangement floraux, les discours solennels du directeur, entrecoupés des chants d'une chorale, tout cela introduit et souligné par de la musique mélodieuse d'orgue d'église. Une drôle d'impression que l'on mariait nos enfants à cette faculté qui restera à jamais gravée dans leur curriculum et leur histoire!

HISTOIRE DE CLASSE

L'une de mes étudiantes de français, à qui je demande de m'écrire, à chaque leçon, un petit rapport au sujet de ce qu'elle a fait récemment, raconte qu'elle est très embêtée, car son mari vient de prendre sa retraite et qu'elle l'a maintenant "sur le dos". En effet, celui-ci, trop souvent absent depuis leur mariage, elle s'était bien organisée et habituée à passer ses journées et ses soirées sans lui, s'occupant de la maison, de ses enfants, sortant avec sa famille, ses amies. Elle avait trouvé ainsi un rythme, un équilibre, et voilà que son homme prend maintenant sa place sur le canapé l'après-midi, qu'il demande à manger trois fois par jour, .... que le bruit des émissions de télévision qu'il regarde lui prennent la tête. Elle me confie aussi, avec un sourire mi-navré mi-amusé qu'à l'occasion de ses courses au supermarché, elle se rend très souvent à la bibliothèque du premier étage afin de prendre un peu de temps et d'espace pour elle, à lire une ou deux heures tranquillement, dans le calme. J'avais trouvé ça si typiquement japonais que ça m'avait fait sourire!

LIVRE

En parlant de femmes japonaises, l'une de mes amies vient de  traduire en français un livre de nouvelles d'une célèbre écrivaine, Seiko TANABE:  9 petites histoires de femmes du Kansai et de leurs amours. Léger, soigné, agréable à lire, il offre des regards de Japonaises sur le Japon, la région du Kansai en particulier, le couple, les hommes. Cet ouvrage me tient actuellement compagnie lors de mes déplacements en train. Et... je vous le recommande!

PETITE MESAVENTURE TECHNOLOGIQUE

Aah, la joie des sièges WC "washlet", à température réglable et à jets nettoyants! La dernière fois, en voulant laver la petite pipette qui diffuse les jets d'eau, j'appuie sur le bouton, comme de coutume, pour la faire sortir de son étui, et, m'approchant pour passer mon coup de torchon désinfectant, voilà que celle-ci se met soudainement sans crier gare à cracher de l'eau que je prends en plein visage. Je recule d'un bond, me plaquant contre la porte des toilettes, mais la puissance est telle que je suis rincée de la tête aux pieds. Résultat des courses: il y avait de l'eau partout, presque jusqu'au plafond et j'en suis sortie dégoulinante. Une mauvaise connexion peut-être ce jour-là? Aah, l'ingratitude et les caprices des systèmes électroniques! En tout cas j'ai été surprise par la pression de ce jet que je sous-estimais largement!

TATAMIS

Rhhaaa de plus en plus d'intérieurs japonais se conçoivent maintenant sans LA pièce à tatamis, entité jusqu'à maintenant indispensable dans toute maison ou appartement japonais qui se respectait, et que même les expatriés nippons se faisaient installer chez eux en Europe, aux Etats-Unis... afin de retrouver un peu dans leur culture loin de chez eux, en compagnie de ce léger parfum de paille fraîche un peu biscuité, caractéristique relaxant, ces matières et couleurs naturelles sobres et si apaisantes. Oui, les tatamis qui, je trouve, constituent l'une des richesses phares de la culture, du quotidien japonais, commencent à prendre une connotation ringarde, surtout que l'on ne peut y déposer de chaises, l'entretien est un peu difficile... Encore une fois, le Japon s'uniformise, se mondialise, perd son caractère, son charme pour se donner ce style pseudo-européen maladroit et ennuyeux, et c'est tellement dommage. Ce type de pièce représente bien une chose que j'apprécie particulièrement ici, que j'adore même, et j'ai bien l'impression que, de plus en plus, il faille être Gaijin pour ça! "Une pièce à tatamis", comme l'a écrit Angelo, le blogueur de Horizons du Japon, "on n'y entre pas, on s'y baigne", et il a tellement raison!

VILLES FRANCAISES ET VILLES JAPONAISES

Emission de télévision encore sur la France. Ils sont vraiment spécialistes ici. Qu'elles sont tout de même belles, les villes françaises qui m'ennuyaient tant. C'est drôle, Il fallait qu'un si long recul me le révèle! En restant là-bas, peut-être même que je ne l'aurais jamais vue, perçue, cette beauté, cette élégance, la magnificence de ces cathédrales, ces grandes bâtisses haussmanniennes sculptées que je trouvais trop lourdes, ces statues, ces fontaines cette harmonie, cette finesse... C'est juste... extraordinaire. Tout cet émerveillement maintenant, c'est le Japon qui me l'a appris, et je lui en suis, de ce fait, reconnaissante. Regarder mon pays avec des yeux de Japonais! Ici, les villes sont plus intéressantes, foisonnantes, anarchiques, colorées mystérieuses, que belles, car aucune recherche d'esthétique, juste le fruit du hasard induit par le pratique, l'économique, le tape à l'oeil commercial, pas d'arbres pour cacher adroitement ce que l'on ne saurait voir, sur la chaussée de laids ponts à piétons rouillés, des néons rouges et jaunes cache misère, un tout autre charme que l'on apprécie d'autant plus lorsqu'on vient d'un pays comme la France!

Voilà, les beaux jours avec le soleil qui rit arrivent, et je vous les souhaite joyeux, au Japon, en France et ailleurs!

Kansaijin

Chroniques : le 23 avril 2018

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J
je viens juste de rentre de 3 semaines de découverte du Japon , et vous remercie de votre newsletter que j'avais abondamment consulté avant de partir . C'est drôle que vous parliez justement des villes japonaises et françaises. En fait je rentre avec une impression très mitigée de mon séjour , justement a cause des villes . Des l'arrivée dans le train entre Tokyo et Nagoya j'ai été choquée par l'amoncellement de maisons qui donnent directement sur la voie ferrée , une impression de traverser des centaines de km de banlieue avec un petit champ de riz coincé de temps en temps entre 2 blocs de maisons. Bien sur j'ai pu admirer des petits enclos d'architecture et de jardins superbes mais toujours noyés au milieu de bâtiments complétement sans intérêt si ce n'est hideux. Céramiste j'ai bien sur beaucoup apprécié des pieces magnifiques et visiter musées et galeries. Peut etre que si l'on sort du kansai et qu'on loue une voiture il existe dans les campagnes ou la montagne de jolis villages mais en temps que touriste utilisant le train et le bus je ne les ai pas vraiment rencontré sauf un peu sur les bordures des villes à kyoto , tokoname ou Tajimi ou nous avons eu le plaisir d’être invité dans la jolie maison d'un potier japonais . Tous mes amis ou connaissance étaient enthousiastes de leur découverte et j'avais rêvé de ce voyage depuis de nombreuses année, il se réalisait pour mes 70 ans. .. En bref je me sens un peu bizarre de revenir avec cette sensation mitigée, enthousiaste sur l'art des jardins, les céramiques , les superbes batiments historiques, l'accueil des japonais dans les petites villes malgré la barrière de la langue , Déçue par le fait que ces beautés sont comme des ilots préservés, parfois une ou 2 rues ou un petit quartier noyé dans un océan d'insignifiance
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K
Merci pour vos impressions Jacqueline. C'est tout à fait ça, le Japon. En fait, les côtes sont comme une ceinture urbaine faisant le tour du pays, l'île de Honshu en particulier. Les terres du centre, étant difficilement constructibles, c'est la rase campagne, les forêts profondes et vallées inhabitées. Mais les villages que l'on peut y trouver ne sont en grande majorité même pas beaux, on ne sait où ils commencent ni où ils finissent, ni autour de quoi ils s'organisent, avec une architecture sans âme et sans caractère, rouillée souvent. Comme vous dites, il existe des îlots préservés où règne pittoresque charme et chaleur, des paysages dignes de contes qu'il faut connaitre, comme Tsumago et Magome, Narai, Omihachiman, que j'ai traités sur mon blog, et aussi Takayama, Shirakawa... même s'ils sont toujours touristiques! Il vaut mieux regarder le Japon avec un champ de vision restreint, comme le font les autochtones, à s'émouvoir sur le "ploc" d'une grenouille sautant dans l'eau d'une rizière de printemps, oubliant la circulation, les constructions anarchiques et le désordre alentour....
S
Génial comme toujours ^^ Merci pour ces partages de quotidien japonais si insolite pour nous qui vivons en France. C'est vraiment une autre culture !
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K
Merci! Toujours contente de pouvoir partager!