Chroniques : Le 28 février 2019
Bonjour !
Le chant mélodieux du rossignol japonais embellit nos matins déjà depuis le 17 février, du jamais vu, ou plus précisément "entendu" depuis que je suis dans le pays, lui qui ne se manifeste généralement que du début à la mi-mars. Les narcisses embaument le bord de la rivière que je longe pour aller faire mes courses, et, déjà aussi, quelques jinchôge (daphnés odorants) parfument précieusement les jardins.
Théâtre Nô
Voilà, je me suis donc laissée convaincre d'aller assister à une petite représentation de théâtre Nô 能, spectacle qui n'avait jamais, jusqu'ici attiré mon attention, même si certes l'un des piliers des arts japonais avec de beaux costumes. Non, ces jeux incompréhensibles, monotones, soporifiques, aux élocutions de vieillards aigres, ponctués de vents de flûte enrayée, de sons creux de tambours et de YooOOOU rauques, dignes d'espèces de plaintes résignées issues du dialecte de ma région d'Alsace, étaient bien loin d'être ma "tasse de thé".
Mais là, ce fut une aubaine, avec des explications en Français! Et, ... c'était très intéressant. J'ai goûté alors, avec plaisir, à cette atmosphère exotique, semblant d'un autre monde, si éloignée du rythme, des formes et des couleurs de mes racines, surgie du passé, mystique, primitive et sophistiquée en même temps.
Ici, vous pourrez survoler pour un petit aperçu.
M'ont étonnée :
Les masques de femmes. Lorsque celle-ci est jeune, 16 ans environ, ses cheveux, la raie au milieu toujours, sont parfaitement bien rangés. S'il s'agit d'une femme plus mûre, 25 ans environ, deux ou trois cheveux dépassent très discrètement striant les côtés du visage, signe d'une certaine expérience dans la vie! Et lorsque l'on veut évoquer une dame très aigrie par les affres de l'existence, il sera utilisé, carrément, une tête de démon cornu aux yeux exorbités.
La scène, aux couleurs et aux formes plutôt sobres. Afin d'évoquer un moment de la journée, ou un moment de la nuit, la luminosité reste inchangée, et ce ne sont que les couleurs des kimonos qui prennent d'autres teintes. Et, si, dans la pièce, il existe un prunier par exemple, celui-ci ne sera pas, matériellement mis en scène, mais évoqué dans les poèmes chantés et par le regard des acteurs.
Le théâtre Nô est donc quelque chose de très codé quasi impossible à un non-averti de comprendre.
Bercée, imprégnée par la musique, j'ai suivi ces gestes lents, économisés au maximum et subtils, ces positions fixes, ces regards figés et ce masque blanc aux yeux vides, hypnotisant, sur lequel je me suis, et heureusement je n'étais pas seule, assoupie.
J'ai demandé à quelques Japonais ce qu'ils pensait de cet art de leur pays. A l'unanimité, j'ai obtenu des mains s'agitant perpendiculairement devant leur visage en signe de négation et des "Wakaranai" (je ne comprends pas). Puis, s'ils s'en sentaient tout de même quelque part proches, si cela leur parlait culturellement, intimement... Ils m'ont tous dit, que non! C'est surprenant, parce que, personnellement, face à eux, j'ai souvent l'impression de me retrouver un peu face à une représentation de Nô, tant leurs expressions peuvent être figées, sembler inexpressives, leurs codes différents, subtils, leurs gestes raides et économisés... Ils disent savoir, avoir appris, reconnaissent que c'est superbe "Sugoï", sophistiqué, classé patrimoine immatériel à l'UNESCO, en sont admiratifs, fiers même, mais parlent de quelque chose de trop lointain, dans le passé peut-être, surgi d'un autre monde des temps anciens, pour avoir un quelconque rapport avec eux, ce qu'ils sont maintenant. Ne le réalisent-ils peut-être pas? Et rares sont ceux qui se déplaceraient spécialement pour assister à une pièce. Plusieurs amis, allés un jour par curiosité, m'ont avoué s'être eux aussi endormis. Le Nô, un remède possible contre les insomnies? A tester...
Paroles de gynécologues japonais
○Une amie japonaise, 52 ans, me fait part de sa stupéfaction face à la remarque d'une moralisation pour le moins déplacée de la part de son médecin. En effet, au cours de sa consultation pour un souci, celle-ci lui demande s'il est possible, dans sa situation, d'avoir des relations intimes. Et ce monsieur de lui répondre, sans doute une lueur de reproche dans les yeux: mais enfin madame, à votre âge, vous n'avez plus besoin d'avoir de rapports sxxuels, si?
De quoi me mèle-je? Non, en France un praticien ne fournit pas ce type de réponse, enfin je ne crois pas, où alors sous peine de grosses représailles...
○Une Américaine, cette fois, 45 ans, se rend chez le sien, ou plutôt la sienne, car elle a bien pris soin de choisir un médecin femme, selon elle davantage à même de la comprendre. Après un contrôle de routine, elle lui avoue, inquiète, qu'après "L'acte", elle aurait tendance à se retrouver vraiment anormalement épuisée. Et cette dame de plisser les yeux, coller sa main sur sa bouche pour se "bidonner" à la Muttley
... avant de lui lancer avec un gras accent du Kansai : maaah, c'est comme tout nééé, il faut y aller molo, n'en faites pas des tonnes! Mon amie se résigna alors à se rendre chez son généraliste, payer une nouvelle consultation, afin de se plaindre de fatigue disproportionnée par rapport à ses efforts, dont elle ne précisera la nature, fournis. Elle en repartit munie de sachets de poudre de carotte asiatique pour la requinquer.
Cas isolés ou véritable tendance au Japon? Je l'ignore, mais je sais les Japonais lambdas pas du tout enclins à aborder le sujet, pas même sur le ton de la plaisanterie, comme je m'étais exclamée un jour vis à vis d'une proche amie dont le fils était né en janvier "Ooh, il a été conçu en avril, alors, sous les Sakuras!". Très embarrassée, elle en avait ri plus jaune que rose! Depuis lors, je m'abstiens de ce type de sortie, mais si le malaise remonte jusqu'à la sphère des professionnels, c'est plus ennuyeux. Cependant, sachez que, vraiment dans la nécessité d'une information, il existe une expression très pratique pour désigner la chose : Fuufu Séikatsu, qui veut littéralement dire "vie de couple" et qui passera "comme une lettre à la poste".
Voilà, O tsukaré sama (formule de politesse japonaise envers quelqu'un qui serait plus ou moins fatigué car a passé beaucoup de temps à faire quelque chose, ou à attendre) pour ceux qui ont lu tout le pavé, qui j'espère à pu vous divertir un peu.
Kansaijin
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Début mars : Chant des premiers rossignols japonais et parfum de daphnés odorants - JAPON BALADES
Pour peu que l'on habite à la campagne ou à l'orée d'une ville, le UGUISU commence, au tout début de mars, à lancer sa jolie mélodie à travers les bois dès le petit matin pour des réveils ...
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Une année de ma vie au Japon - Mon exil - Anna Fujimoto
Ce fut pour Anna Fujimoto comme une intuition, une évidence, elle voulait faire sa vie au Japon. Voici donc une année de son existence au cœur du pays du soleil levant, une drôle de "planète" ...
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